On ne finira jamais de s’étonner de la capacité des réseaux sociaux à réenchanter le réel par de nouveaux mots et de nouveaux codes esthétiques. Aucun univers n’y échappe. Et encore moins ceux qui ont quitté les radars de la modernité, qui trouvent là l’opportunité d’y retourner par la grâce d’un engouement aussi soudain qu’inattendu. Les herboristes peuvent en témoigner.
Jusqu’à présent, on les imaginait plutôt austères et d’un âge respectable, installés dans des magasins dont l’apparence devait explicitement rappeler leur appartenance à une époque très éloignée. Des bibliothèques en bois, des pots en porcelaine, des mortiers et des pilons en céramique comme gages de crédibilité. Propulsés sur les réseaux, les voici qui ré-apparaissent en « herbalist influencers » (ça va tout de suite mieux) où ils partagent des recettes, aussi alléchantes qu’instagrammables, imaginées à partir de plantes oubliées, et distillent toute sortes de conseils pour notre plus grand bien. De quoi nourrir un florissant business, objectif toujours présent dans l’esprit des influenceurs…
Résultat ? Jamais les plantes n’ont reçu autant d’attention qu’aujourd’hui. Toutes les marques qui gravitent du côté de la santé, de la beauté et du bien-être (cela en fait beaucoup) l’ont bien compris. Elles multiplient leurs travaux de recherche pour identifier LA plante aux vertus exceptionnelles, et encore ignorée de leurs concurrents, qui pourrait booster leur notoriété. Mais ceci n’explique pas tout.
Le succès actuel des « herbalist influencers » est aussi à rapprocher de celui du fait-maison, à la fois porté par un désir de contrôler ce que l’on consomme et par celui de faire des économies. « Ce que je fabrique est forcément meilleur que ce que me propose l’industrie » et « ma créativité est sans limite » sonnent comme de nouveaux mantras. Les millions de vues générées par le masque Botox aux graines de lin, présenté comme le nouveau remède naturel au vieillissement, en sont la preuve. Deux ingrédients seulement, une traçabilité immédiate et beaucoup d’espérances : qui y trouverait à redire ?
Enfin, et le point n’a rien de négligeable, celles et ceux qui se présentent comme « herbalist influencers » doivent aussi leur succès à la communauté qui les porte, dont la force tient autant aux valeurs partagées par ses membres, qu’au sentiment d’appartenance qui les unit. Qu’est ce qu’une communauté sinon un centre d’intérêt qui a réussi ?
So What ?
Une espérance (se sentir mieux) + la possibilité d’exprimer sa créativité (sa vision du monde) + le sentiment d’appartenance à une communauté (se sentir relié) = la recette du succès marketing.