Il y a peu, on découvrait coup sur coup, les dernières productions publicitaires de Picard et de La Redoute. Deux marques familières, aimées, installées dans le coeur et l’esprit des Français qui, pourrait-on penser, n’ont plus besoin de se présenter. Simplement de venir expliquer leur raison d’être en cette période où la parole des marques est de plus en plus suspecte et le sens de la consommation questionné.
Chez Picard, finies les sempiternelles images de bols et d’assiettes, place aux « vrais gens » (vus par la pub) qui défilent devant la caméra, accueillis par un Bienvenue fédérateur qui ne doit surtout oublier personne. Bienvenue à toi qui n’attends pas la saison pour que ce soit la saison, aux fans de légumes motivés (comprenez, les végétariens) qui n’ont rien contre un burger, à toi qui n’habites pas un palais, etc. Le film s’achève par l’indispensable compartiment RSE mettant en scène collaborateurs, fournisseurs et producteurs, bien séparé de la partie dédiée aux consommateurs, ce qui n’est pas sans poser de questions…
Du côté de La Redoute, on continue de décliner la fibre sociétale émotionnelle qui constitue désormais son territoire d’expression. Après les relations parents-enfants au sein des familles recomposées, voici le temps des relations fraternelles. Deux frères qui se chamaillent et s’aiment bien. Le grand quitte la maison et laisse sa chambre au plus petit. Une histoire simple et « authentique » racontée en une minute et au cours de laquelle La Redoute ne manque pas une occasion ne nous proposer quelque chose à acheter.
Ces deux films incarnent parfaitement la manière dont les marques aiment aujourd’hui se voir : inscrites dans le quotidien, s’adressant à tout le monde (obligation d’inclusivité) et au service de la vie. Une ambition qui vise l’universel au risque de perdre le spécifique. Le film Picard aurait-il été différent s’il avait été signé par Carrefour ? Et le film La Redoute par Amazon ? Quel est le rôle de Picard ? De donner envie, de surprendre, de faire découvrir. De transformer ses clients, de les emmener dans un ailleurs à eux-mêmes et non de les laisser où ils sont dans leur diversité et leurs vérités. Expliquer le rôle de La Redoute comme marketplace doit-il nécessairement passer par l’idée que la consommation permet toutes les réparations affectives, idée un peu dérangeante au moment où l’on cherche partout le sens et la responsabiité ?
Que construisent finalement ces marques pour elles-mêmes ? Où sont passés les concepts qui font les territoires des marques ?