La recette du succès

Comment séduire de nouveaux consommateurs ? Telle est la question que toutes les marques se posent, un peu chaque jour et beaucoup chaque fin d’année, au moment des comptes et des bilans. La Brioche Dorée (élue Meilleure chaîne de magasin 2019/2020 dans la catégorie sandwicherie et meilleure franchise 2019/2020) vient d’y répondre avec son nouveau concept, récemment installé rue de la Verrerie, à Paris. Son décryptage a valeur de leçon de marketing.

Première évolution mise en œuvre : rassurer sur les origines. Ici, l’offre est 100 % Made in France et la cuisine est ouverte pour que chacun puisse s’assurer que tout est bien fait sur place. Les origines sont aujourd’hui devenues la principale préoccupation des consommateurs et, dans ce contexte psychologique, la production locale vient non seulement rassurer, mais aussi suggérer l’idée de création d’emplois et donc de citoyenneté. Pas négligeable. Pour les amateurs d’encas très terroir, l’enseigne a aussi sourcé une sélection de produits auprès de petits producteurs qu’elle propose en « impulsion » dans ses vitrines ou dans le pôle « épicerie » de son magasin… Autre évolution : des recettes inédites, élaborées en collaboration avec des MOF. Une bonne manière d’étonner ses clients par une proposition riche en imaginaire et en storytelling. Qui pouvait imaginer un MOF dans une sandwicherie ?

Il est aussi désormais possible de choisir en direct la taille de son sandwich : quart de baguette, demi baguette ou trois quarts de baguette, dimensionnées à la commande. Une manière inédite de satisfaire tous les appétits et, une fois encore, d’étonner ses clients. Les tartelettes, de leur côté, ont adopté un format finger food, plus commode pour une consommation ambulante. Moins chères, plus pratiques. Malin. L’enseigne a enfin ajouté à son offre de boissons habituelle, des eaux infusées maison, des citronnades et même des fruits mixés sur place. Une bonne manière de décliner la naturalité. Pour parachever son repositionnement, la Brioche Dorée a évidemment mis à disposition de ses clients des bornes de commande pour un retrait rapide en caisse, du click and collect et un service de livraison. Car réinventer son enseigne, c’est réinventer l’expérience proposée à ses clients.

Du fait maison, du local, de la naturalité, de la personnalisation, de l’étonnement et du service : la feuille de route des enseignes de restauration de demain est déjà là.

Un monde de gourdes

La mode tient toujours à un détail. Dans les années 90, hommes et femmes (mais surtout femmes) se sont soudain mis à se déplacer en ville avec des gobelets à couvercle en plastique de chez Starbucks à la main. Sex and the City était passé par là. Dans les années 2000, les mêmes adoptèrent ces grands verres transparents en plastique, agrémentés d’un chapeau bombé troué par une paille (avant leur diabolisation…) dans lesquels on pouvait trouver, au choix, un smoothie, un quelque chose au matcha, un bubble tea ou une boisson healthy et instagrammable. L’objet (sans nom) a, depuis, laissé sa place à la gourde après une courte apparition du mug isotherme, sans doute pas assez vintage pour s’installer durablement.

Elle revient pourtant de loin, la gourde qui traverse actuellement notre quotidien. Du temps des scouts et des colos, quand elles étaient en fer cabossé qui donnait un indescriptible goût métallique à tous les liquides qui s’y perdaient. La gourde est aujourd’hui installée dans les filets des sacs à dos des start-upeurs, sur les bureaux des étudiants concernés ou des coworkers de passage, quand ce n’est pas dans le panier des vélos à bobos. La gourde n’est pas seulement moderne, elle est aussi cool. Certes, on ne voit pas (encore) beaucoup de gourdes chez les experts-comptables ou sur les chantiers, mais rien ne dit que l’épidémie n’est pas en train de les gagner. Car la gourde a de la ressource et les motivations pour l’adopter ne manquent pas.

C’est bien sûr l’occasion d’aller se servir au robinet ou à la fontaine à eau et d’ainsi accomplir plusieurs actions : des économies de ressources, de plastique et de transport, ainsi qu’un (petit) geste pour Greta, ce qui ne fait jamais de mal. C’est aussi une manière d’afficher un signe d’appartenance car, comme tous les objets de mode (ou à la mode), les gourdes émettent des signes et chacun peut reconnaître les siens. Entre les gourdes de randonneurs et celles des influenceuses importées de New York ou du Japon, c’est peu dire qu’il y a du monde. On trouve ainsi des gourdes griffées en verre avec filtres intégrés et dragonnes stylées, des gourdes publicitaires avec leur bonne conscience en accroche, des gourdes Nature & Découvertes en inox, des gourdes design en céramique, verre pastel ou faux bois, des gourdes de geeks saturées de stickers, des gourdes de jeunes filles fleuries ou avec plein de dauphins dessus…

Bref, il y a une gourde pour chacun(e) et il y a fort à parier que l’une d’entre elles sera prochainement déclarée iconique, ultime reconnaissance de la patrie fashion. Même un objet anti-gaspilage peut se retrouver au coeur de la consommation. C’est dire si le marketing est fort.

BlackandGreen

Phénomène apparu en France en 2013, directement importé des Etats-Unis, le Black Friday est venu s’installer dans un moment de calme consommatoire, entre la Rentrée et Noël, avec l’idée de relancer nos envies d’achat quand celles-ci commençaient à hiberner. Le marketing a décidemment horreur du vide. Le succès du Black Friday est tel qu’il est devenu, au fil du temps,l’antichambre de Noël par les « bonnes affaires » qu’il fait miroiter (les moins 70% n’étonnent plus personne). Tout allait donc pour le mieux dans le monde merveilleux de la consommation… jusqu’à cette année, où des voix contraires se font entendre…

Difficile, en effet, de ranger le Black Friday entre les Marikondistes et les Grétistes. Car trop, c’est toujours trop. Trop de remises, trop d’hystérie, trop d’incitations, trop d’accumulations, trop de dépenses. Et voilà qu’apparaît le Green Friday, un mouvement né de l’envie de sensibiliser les citoyens à une consommation responsable. Il ne s’agit pas, aux dires de ses fondateurs, de faire culpabiliser le consommateur, mais de l’inciter à s’interroger sur ses modes de consommation en le poussant au questionnement sur son impact écologique. Pas facile facile.

Fondé par un collectif de six membres : Envie, Altermundi, Dreamact, Emmaüs France, Ethiquable et le Réseau des Acteurs de Rémploi (REFER), avec le soutien de la Mairie de Paris, le mouvement proposera ainsi, le dernier vendredi de novembre, une centaine d’animations et d’ateliers de sensibilisation (rénovation et réparation de vêtements et d’appareils, ateliers DIY, conférences…) un peu partout en France. Mieux encore, des enseignes ont rejoint le mouvement et ont décidé, elles aussi, de ne pas casser les prix ce jour là, mais d’organiser des événements. La marque Faguo, par exemple, proposera de faire un état des lieux de nos biens de consommation afin de savoir ce qui peut être réparé, donné, vendu ou recyclé. La marque de maillots de bain Luz offrira à trois membres de sa communauté la possibilité de rencontrer son équipe créative pour participer à un exercice de co-création. Certains magasins ont même choisi de rester portes closes. Plus radical.

Il faut se réjouir de toutes ces initiatives car elles viennent révéler la même envie : s’approprier un moment de consommation pour lui donner plus de sens. Ici, ce sont des soldes plus responsables. Là, une carte-cadeau patriote dédiée aux achats made in France (lancée début novembre). Encore ailleurs, une opération comme la Saint Glinglin imaginée pour re-animer les centre-villes (prévue pour mars prochain). Cela fait plus de 50 ans que la consommation impose ses rythmes et sa logique aux consommateurs. Comment s’étonner que ceux-ci veuillent désormais la façonner à leurs valeurs ?

Un pas de côté

Dans le Figaro du 30 octobre dernier, Philippe Gloaguen, le fondateur du Guide du Routard que l’on ne présente plus, nous incitait à « oser le pas de côté » à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage : un « beau livre » au délicat titre de « Voyages France », richement illustré et fleurant bon le patrimoine façon « Des Racines et des ailes ». Châteaux, cathédrales, îles de rêve, terroir et plats canailles. 2,64 kg, 384 pages, 690 photos, plus de 400 illustrations, le tout pour 35 euros, soit un peu plus de 13 euros le kilo. Une affaire qui sent tout de suite le sapin… de Noël.

On apprend ainsi que 75% de la population touristique va sur 15% des lieux. D’où l’idée du « pas de côté ». Certains esprits malins ne pourront s’empêcher de penser que le premier pas de côté est sans doute de racheter un Guide du Routard pour partir en voyage alors que les sites et applis de tous poils pullulent.

Faire un pas de côté, c’est aussi savoir s’éloigner des réseaux sociaux et de leur obligation de selfies à des endroits pré-déterminés. Le raisonnement est-il d’ailleurs limité au seul secteur du tourisme ? N’avons-nous pas, nous aussi, dans notre quotidien, tendance à répéter les mêmes gestes, à fréquenter les mêmes marques et les mêmes enseignes et à suivre les suggestions faites sur les réseaux sociaux par nos « amis » dont nous ignorons souvent beaucoup ? Historiquement reflet d’une appartenance sociale, la consommation est devenue, au fil du temps, un signe identitaire. « Je consomme ce que je suis » a ainsi progressivement laissé la place à « Je suis ce que je consomme » qui, face au développement des réseaux sociaux, finit par devenir « Je suis ce que les autres me suggèrent de devenir ».

Les réseaux sociaux qui auraient pu être des véhicules inédits pour accéder à de la différence et à de l’originalité agissent in fine comme des boussoles permettant à chacun de se convaincre qu’il évolue bien dans le sens qu’il croit être le bon. Conséquence : l’effet miroir rôde sans relâche engendrant une conformité de consommation comparable à celle observable dans le secteur du tourisme.

Heureusement que depuis quelques années, les consommateurs se montrent de plus en plus curieux des « petites marques » locales, de producteurs indépendants ou importées de très loin. Une bonne nouvelle pour la démocratie consommatoire et une manière de souligner la nécessité du pas de côté en toutes circonstances.

Un moment singulier

Le groupe foncier Unibail-Rodamco-Westfield a récemment signé un partenariat avec The VOID, leader dans le domaine de la réalité virtuelle, pour proposer des expériences d’immersion virtuelle aux clients de ses centres commerciaux. 25 d’entre eux accueilleront prochainement des espaces de jeux vidéo en réalité virtuelle, inspirés de Star WarsRalph ou encore de SOS FantômesDe quoi alimenter la tendance « retailtainment » que tous les experts prédisent comme étant le futur du commerce.

Les centres commerciaux l’ont compris avant les autres. Ils ont commencé très tôt à se transformer en parcs d’attractions à coups de patinoires, d’aquariums, de cinémas et de manèges en tous genres, puis se sont lancés dans l’organisation de concerts, de mini spectacles voire de démonstration fooding, avant de devenir des réserves de chasses aux Pokémons destinées à séduire les familles et les repésentants des générations Y et Z. Les voilà désormais à l’ère de la réalité virtuelle.

Tous les commerces ne se sont pas coulés dans la modernité avec autant de facilité. Ce sont d’ailleurs souvent ceux qui ne font rien qui se plaignent de la concurrence des acteurs du net ou des grandes enseignes périphériques… Les magasins d’un même centre ville ne pourraient-ils  pas, eux aussi, s’envisager comme membres d’un « centre commercial » et s’organiser pour imaginer des animations, réelles ou virtuelles, qui ne pourraient que leur être profitables ?

Alors que l’on peut désormais tout voir et tout acheter sans sortir de chez soi, comment réussir à motiver les consommateurs à se rendre dans des magasins souvent situés loin de chez eux et pas toujours ouverts comme ils le souhaitent ? En leur faisant oublier qu’ils sont venus là pour acheter. Il suffisait d’y penser. Consommer, ce n’était que dépenser ; aujourd’hui, c’est aussi participer à une culture communautaire ; demain, se sera, en plus, un moyen de se rendre « ailleurs » à travers des expériences mémorables et sensoriellement engageantes. Une forme de consommation dématérialisée.

Contes et légendes

Un peu désorientées par les caprices de leurs clientes qui semblent toujours se fier à ceux qui ont parlé les derniers, les marques de cosmétiques s’accrochent à leurs territoires pour justifier l’attrait de leurs produits. Beaucoup capitalisent sur les laboratoires et les hommes en blouses blanches, grands pourvoyeurs de sérums aux arguments scientifiquement prouvés (Filorga) ou sur Mère Nature où elles espèrent dénicher une plante incroyable et forcément ultra performante qu’elles déclareront parée de mille vertus fantasmatiques (l’immortelle de L’Occitane ou l’orchidée de Guerlain). Certaines se tournent vers les pierres, manière de renouveler l’approche tout en restant eco-friendly. D’autres cherchent à ancrer leurs discours sur une région géographique ou tentent carrément l’irrationnel et le magique (Garancia).

Peu d’entre elles pensent à l’histoire, pourtant riche en références, en expérimentations et en imaginaires de toutes sortes. L’Officine universelle Buly a choisi cette voie, et propose depuis sa création une offre inédite, mélange d’espit d’apothicaire et de références historiques. La marque propose même une collection inédite de huit parfums inspirée des chefs d’œuvres du Louvre. La beauté de la culture au service de la culture de la beauté. L’ensemble est en vente jusqu’en janvier prochain dans un pop-up store dédié situé au sein du musée. Dans le même registre, le magasin pékinois Creativ Store s’était déjà singularisé en se rapprochant du Palace Museum de la Cité interdite pour proposer six rouges inspirés des couleurs traditionnelles chinoises.

Le succès des initiatives attachées à l’Histoire n’est pas si surprenant si l’on observe bien ce qui se passe. Sur les marchés alimentaires, les « légumes oubliés » ressuscitent à tous bouts de champs et les recettes d’autrefois transforment les terroirs en tiroirs caisses. Ailleurs, le succès du vintage n’est plus à démontrer, tout comme celui des journées du patrimoine qui pourraient, sans problème, devenir mensuelles. On pourrait aussi évoquer l’engouement pour le vinaigre blanc devenu iconique dès que la question de l’entretien de la maison se pose.

Se tourner vers le passé, c’est rassurant. C’est souvent infusé de bon sens et de vertus non contestables. C’est aussi une manière de faire perdurer ses souvenirs. La quête de sa jeunesse n’est pas loin…

Micro excitation

Du 23 septembre au 6 octobre dernier, chez Bio c’Bon, ceux qui possédaient la carte de fidélité de l’enseigne avaient la possibilité de se faire rembourser leurs courses en présentant, lors de leur passage en caisse, un code reçu par SMS. A en croire l’enseigne, chaque client avait une chance sur dix d’atteindre cet objectif. Ceux qui fréquentent les taxis Kapten pouvaient, eux, tenter un « match » avec leur chauffeur. S’ils se retrouvaient dans la voiture d’un chauffeur qui les avait déjà conduits, leur course leur était offerte et le chauffeur bénéficiait d’une prime. Gagnant-gagnant. Et une manière inédite de souligner que la reconnaissance est une des expressions les plus valorisantes de la fidélité.

Uber n’a pas tardé à répliquer avec son Ride to Win : commander un véhicule, c’est avoir aussitôt 9 chances sur 10 (dixit Uber) de remporter un cadeau parmi lesquels, des voyages, un an de Uber (!), 3000 euros de crédits (!!) ou « des millions d’autres cadeaux » (!!!). On pourrait aussi signaler les bandits manchots automatiques situés devant les caisses des supermarchés Intermarché où chaque client peut présenter le code barre de son ticket dans l’espoir de recevoir une prime. Il n’est pas interdit de se rendre à son Bio c’Bon en Kapten et chez Intermarché en Uber…

Alors que le prix semblait avoir été déclaré vecteur d’attractivité majeur des enseignes, voilà que ces dernières veulent maintenant renouer avec les bons vieux jeux concours avec tirages au sort. Mais pourquoi donc ? Certains ne manqueront pas de venir nous rappeler que personne ne peut résister à la micro excitation incarnée par l’idée de « gagner quelque chose ». Aucune classe sociale ou d’âge n’échappe à la règle. D’autres souligneront avec justesse que la consommation, par trop de story-tellings et de comparaisons à tout va (merci les réseaux sociaux) a fini par devenir un sujet de préoccupation alors qu’elle n’est finalement qu’une activité routinière, voire parfois, assez peu impliquante.

Les jeux viennent lui redonner sa part de légèreté et de ludique perdue et on peut raisonnablement penser que le filon est loin d’être tari. Je consomme, donc je joue ?

Ouverture d’esprit

Du 19 au 22 septembre dernier, My Little Box, le service d’abonnement mensuel de box de produits de beauté et d’accessoires, inaugurait une session d’ateliers et de conférences appelée Beauty School dans ses locaux de Barbès, à Paris. Une dizaine de conférences y étaient proposée sur des thématiques comme « La représentation de la beauté : comment dire non ? » animée par Pénélope Bagieu ou « Scan me if you can » avec Julie Chapon, fondatrice de l’application Yuka. Des ateliers étaient également au programme avec des cours de hip-hop, de confiance en soi ou de flamenco (!). Un moment festif, mais pas que. Soutenu par ses partenaires Estée Lauder (qui organisa une soirée pour l’occasion) et René Furterer (qui anima un espace coiffure), My Little Box souhaitait ainsi réunir sa communauté et lui proposer une vision différente de la beauté en l’ouvrant à des questions plus larges comme l’environnement, l’entrepreneuriat ou encore l’engagement social. Tous les publics étaient les bienvenus à cette première session de Beauty School.

Une fois encore, l’exemple vient du net et on se demande ce qu’attendent les marques de l’ancien monde pour l’imiter. Certaines d’entre elles n’ont-elles pas, elles aussi, des clients fidèles qui entretiennent avec elles des relations quasi fanatiques ? Pourquoi ne leur ouvrent-elles pas leurs locaux d’autres jours que celui du patrimoine (et encore). Pourquoi n’organisent-elles pas, elles aussi, des conférences ou des ateliers pour proposer des regards différents sur leurs produits et leur univers ? Solliciter sa communauté ce n’est pas seulement l’inciter à acheter plus, c’est lui adresser un signe de reconnaissance et de bienveillance. C’est aussi contribuer à l’ouverture et au rayonnement de sa marque et l’aider à se retrouver au milieu des conversations.

Début octobre, Mini lançait Mini Society, sa première plateforme communautaire en ligne. Outre des infos, des services pratiques et un magazine en ligne centré sur le sport, la gastronomie ou les voyages (rien de très original), elle propose des road trips en Mini, des visites de ses usines, des journées d’essais sur circuit et des invitations chez ses partenaires. On aurait aussi aimé y trouver des interventions de designers, d’architectes, d’urbanistes, d’artistes et même, pourquoi pas, de philosophes… Plus tard, peut-être…

Marques au foyer

La nouvelle est restée discrète, mais elle n’en est pas moins révélatrice de l’enjeu d’innovation pour les enseignes, face à l’installation des sites de e-commerce dans nos habitudes. Optic 2000 (qui devrait songer à se renommer Optique 3000 car le temps file) annonçait il y a peu son intention de développer le commerce à domicile. Non pas de reproduire, une fois encore, le modèle des réunions Tupperware fondé sur le principe des ambassadeurs de marque, mais bien de se rendre directement au domicile de ses clients pour leur proposer ce qu’ils trouvent habituellement dans ses magasins. Au moment où les centres-villes riment parfois avec centres vides, l’idée de s’inviter chez les Français qui n’ont plus l’occasion (ou plus l’âge car ce service vise aussi les seniors….) d’aller faire leurs courses « en ville » n’est pas dénuée de bon sens. Si tu ne viens pas au commerce, le commerce viendra à toi.

Optique 2000 n’est pas le premier à y penser (les bien nommés Opticiens Mobiles sont déjà sur le coup), mais il est le premier à s’y investir aussi fortement. Il faut dire qu’il y a de quoi se frotter les mains puisque, après une période de tests menés l’année dernière, 95% des personnes ainsi visitées auraient acheté une paire de lunettes pour un panier moyen de plus de 500 euros pour les verres progressifs. Le principe est simple : le magasin le plus proche du domicile à visiter prend un premier contact pour mieux comprendre les besoins et les goûts de la personne concernée avant de se rendre à son domicile avec une première sélection de montures. Une seconde visite suit rapidement pour la livraison et l’ajustement des lunettes. Les tarifs sont les mêmes qu’en magasin et le déplacement n’est, bien sûr, pas facturé. Simple, transparent, rassurant.

Entrer dans les foyers cumule les avantages. C’est comprendre comment les gens vivent plutôt que constater ce qu’ils achètent. C’est tisser une relation de proximité fondée sur l’intimité et non sur la régularité des visites en magasins. C’est faire le plein de petites informations qui contribueront à nourrir le lien entre une enseigne et ses clients bien plus efficacement qu’à coups de carte de fidélité récompensée.

Pas étonnant que les enseignes soient aujourd’hui nombreuses à être tentées d’entrer dans les foyers…

Néo-bazars

Alors que les magasins appartenant à des chaînes de prêt-à-porter sont à la peine (C&A, Kiabi…) et tendent à disparaître des villes moyennes, un nouveau type d’enseignes, que l’on pourraient qualifier de « nouveaux bazars », semblent afficher une bonne santé. Elles vendent de tout, pas toujours utile, mais toujours trendy et à des prix attractifs. Font partie de cette famille, l’hollandaise Hema (180 points de vente en France) ou encore les danoises Flying Tiger Copenhagen (une soixantaine de magasins en France), Little Extra du groupe Auchan, et Normal qui vient d’ouvrir sa première adresse parisienne Passage du Havre, près de la gare Saint Lazare, ainsi que deux autres en périphérie. Sans oublier Action, spécialiste du déstockage, inconnue des Parisiens, mais qui compte tout de même 450 magasins en périphérie des villes sans jamais faire aucune publicité (aujourd’hui la troisième enseigne préférée des Français derrière Décathlon et Leroy Merlin…).

Toutes ces enseignes proposent une même offre (maison et cosmétique en majeur, alimentation en mineur) présentée dans un agencement foisonnant, mais pas fouilli, et partagent la même ambition : générer des achats d’impulsion. Un comportement qui, longtemps, fut le moteur de la consommation et qu’il faut aujourd’hui réanimer tant il est en train de disparaître face à des offres qui s’uniformisent, à des soldes permanents et à un questionnement omniprésent au point de devenir bloquant (D’où viennnent ces produits ? Comment ont-ils été transformés ? Sont-ils respectueux de l’environnement ?).

Pour y parvenir, la solution consiste à savoir mettre en scène la rareté et l’inattendu de son offre pour donner sans cesse de nouvelles raisons d’acheter. Les nouveaux bazars en ont fait leur fer de lance. Elle est aussi de savoir s’éloigner de la seule promesse de bas prix. Le récent retrait du marché de Tati est venu cruellement nous le rappeler. Si les préoccupations budgétaires sont bien sûr la clé de leur succès, celles-ci ne sont pas mises en avant, mais arrivent derrière le sentiment d’accéder à une offre qui colle à l’air du temps et ne semble pas avoir été conçue pour une cible particulière.

Aucune forme de consommation ne doit venir rappeler une réalité économique ou sociale. Là réside sans doute toute la différence entre « discount » et « smart discount » …