Consommation partagée

Pas un secteur, pas un produit, pas une marque ne peut échapper à l’innovation. Penser que l’on peut se « contenter de ne rien faire » est non seulement une erreur stratégique au moment où aucun marché n’est à l’abri de concurrents inattendus mais aussi et surtout souvent le signe d’un manque d’imagination.

Prenons le marché des produits laitiers frais. Quoi de plus banal qu’un yaourt nature ? Vouloir le « réinventer » est presque une caricature de thème de brainstorming proposé dans le cadre d’une « journée au vert » imaginée par un service marketing pour stimuler ses équipes… C’est pourtant à cette ambition que s’est attelé Intermarché qui propose depuis peu et en exclusivité, Yéo, la première « Fontaine à yaourt »….

Une « Fontaine à yaourt » ? Il fallait y penser. Un yaourt présenté dans une poche souple type Doypack dans un format inédit de 1,5 kg (soit 8 à 10 portions) à placer au frigo et destiné à toute la famille au gré de ses envies. Le produit peut être consommé jusqu’à 6 jours après ouverture grâce à son robinet hermétique. Depuis le yaourt à boire (inventé au siècle dernier), on n’avait pas vu de pareille nouveauté sur ce marché. Et ce n’est pas une marque qui en est à l’origine, mais une enseigne…. No comment.

Avec son emballage écologique, Yéo contribue aussi à la réduction des déchets… Bien joué. Dans la doxa marketing traditionnelle, il est recommandé de partir de l’observation des usages et des comportements des consommateurs pour aboutir à de nouveaux formats ou à de nouveaux packagings. L’exemple de Yéo vient d’abord nous prouver que cette voie n’est pas la seule, et que le packaging peut être à la source de nouveaux usages et de nouveaux comportements.

Yéo vient aussi illustrer que les attentes actuelles de plus grande responsabilité environnementale de la part des marques peuvent conduire non seulement à de nouveaux emballages, mais aussi à de nouveaux usages partagés… Un cercle vertueux. Faire écolo signifie faire autrement. Pas seulement faire « moins » (quand ce n’est pas faire « moche »…), mais aussi faire « collectif ». Les formats à partager font autant de bien à la planète qu’à « l’être ensemble ». Quelle marque pourrait s’en passer ?

Je bois, donc je suis

Chaque année, le Consumer Electronic Show fait figure « d’appartement témoin » du futur. Y est présenté tout ce qui devrait constituer notre quotidien de demain. N’oublions toutefois pas que ce salon se passe à Las Vegas, capitale du jeu. On ne gagne pas à tous les coups. Cette année, deux innovations ont attiré les regards.

D’un coté, Brewie (conçue par une start-up hongroise), une machine connectée qui permet de brasser la bière à la maison. Une poudre, un peu d’eau, une carte RFID et l’application permet de réaliser automatiquement une recette de bière parmi une large base de données alimentée par la communauté et des brasseurs professionnels… Compter 5 à 6 heures de cuisson et de 5 à 14 jours de fermentation avant de déguster sa bière maison. De l’autre, Somabar un appareil connecté à un smartphone qui permet de préparer un cocktail, parmi les 300 proposés, en fonction des alcools et ingrédients présents dans des tubes à essais clipsés à l’arrière de la machine et des préférences de dosage de l’utilisateur.

Deux innovations « générationnelles » puisque fondées sur le smartphone et inspirées par un mode de vie où « boire des coups avec ses potes » constitue l’épicentre de la vie sociale. Deux innovations qui viennent aussi annoncer le rapprochement de deux univers considérés pour le moment comme éloignés : la grande consommation et l’électronique grand public.

Ici, les applications ne servent pas seulement à comparer le prix des produits ou à savoir si tel ou tel produit est écologiquement responsable, mais à élaborer des recettes « en vrai ». « Faire comme », « se mettre à la place de », « se prendre pour » sont aussi autant d’opportunités offertes de bien comprendre sa consommation et les processus de fabrication qui lui sont associées que de mieux cerner ses propres goûts et attentes. 

La consommation a longtemps été regardée comme étant au service de l’expression de soi. La voilà aujourd’hui au service de la connaissance des produits. Et pourquoi pas, demain, aussi, au service de la connaissance de soi ?

L’ailleurs est ici

Les anglo-saxons, qui ont toujours un nom pour qualifier leurs observations, parlent de « staycation », hybride de Stay et de Vacation, pour décrire une tendance qui consisterait à prendre des vacances pour rester chez soi ou autour de chez soi. Le phénomène toucherait les citadins victimes de la crise, tous les surchargés de travail ainsi que ceux qui considèrent un déplacement en avion comme un crime contre la planète. Plus récemment, sont venus s’ajouter à la liste ceux qui craignent des attentats ou des menaces épidémiques… Résultat : le phénomène toucherait de plus en plus de monde et prendrait diverses formes.

Aller à l’hôtel dans sa propre ville en serait une, plutôt inattendue. Après le tourisme d’ailleurs, vive le tourisme d’ici. De plus en plus d’hôtels offriraient ainsi des prix cassés sur les chambres restant disponibles en fin de journée. Pourquoi pas. Une autre consisterait à s’évader en banlieue où les prix, plus abordables, permettent d’accéder à plus d’espace et à des jardins contribuant largement à l’amélioration de la qualité de la vie. Le rapport au domicile principal se teinterait alors de l’imaginaire habituellement associé aux résidences de vacances. Plus cool, sans doute, plus créatif, parfois. Jardiner, fabriquer ses propres confitures, pratiquer le yoga sur sa terrasse, pour ne reprendre que les fantasmes les plus véhiculés par la presse féminine, deviennent alors possible.

La « staycation » peut aussi avoir pour effet d’inciter les citadins à regarder et à vivre différemment leur ville : explorer ses arrière-cours et anciens ateliers, ses moindres recoins jusqu’aux plus éloignés (à Paris la carte Navigo dézonnée accompagne ce mouvement), parcourir ses différents quartiers en Vélib’, Segway ou skate, installer des poulaillers et des jardins communautaires en sont les expressions les plus visibles.

En poursuivant l’idée d’une échappatoire possible aux contraintes et à la répétition de la vie quotidienne, le phénomène de la « staycation » contribue à l’émergence d’un nouveau rapport à la ville. Et vient nous rappeler que la réalité est surtout une affaire de regard.

Esprit es-tu là ?

Les marques ont toujours recherché la présence d’artistes. Une manière pour elles de montrer leur sensibilité, autant que de faire preuve de leur modernité et de leur aptitude à être en prise avec l’air du temps. Selon les époques, on a d’abord aperçu les affiches et les murs peints d’affichistes, puis découvert la présence d’artistes ou de stars directement aux côtés des marques. Le plus célèbre et le plus précurseur d’entre eux étant sans aucun doute Salvador Dali, car il ne se contentait pas de poser pour inciter les consommateurs à l’imiter, mais donnait véritablement de sa personne.

Plus récemment, les marques se sont mises en quête de « jeunes artistes » avec l’idée de leur demander de participer à la conception de « collections capsules » ou d’éditions limitées de toutes sortes. Une nouvelle approche. Ici, il ne s’agit plus pour l’artiste de rester à distance et de se contenter de témoigner, mais d’agir, de proposer. En un mot, de créer. Et pour la marque d’être considérée comme un intermédiaire créatif. De quoi séduire tout bobo-hipster-urbain doté d’un peu de pouvoir d’achat…

Mi-janvier, Le Bon Marché ouvrait une nouvelle voie dans la relation marque-artiste en invitant dans ses murs, ses vitrines et ses allées, l’artiste chinois autant recherché par le gouvernement chinois que par l’intelligentsia culturelle du début du siècle : Ai Weiwei. L’opération n’est pas qu’un coup médiatique dont l’objectif (largement atteint) aurait été d’obtenir un maximum de retombées dans les médias de tous poils. Elle est aussi l’illustration d’une nouvelle forme de collaboration entre marques et Créateurs. Ici, pas d’offres particulières, de produits réalisés par l’artiste spécialement pour l’événement. Pas, non plus, de lieux d’exposition dans le magasin. Les œuvres sont partout et viennent comme des éléments de décor. Une mise en vie plutôt qu’une mise en scène. L’opération ne vient-elle pas surtout illustrer l’intérêt d’aller chercher un univers très loin du sien et de ses valeurs pour accroître sa notoriété ?

L’incarnation de la contestation et de la résistance dans le temple du conformisme rive gauche permet ainsi au Bon Marché de devenir le magasin dont tout le monde parle sans jamais devoir évoquer son offre. La preuve que le magasin possède bien un esprit.

Doggy-bagging

Chaque début d’année s’accompagne de son lot de nouveautés qui ne se réduisent pas toutes à des augmentations de prix… Depuis le 1er janvier, il est ainsi désormais « recommandé » aux restaurants servant plus de 180 couverts par jour de proposer un « doggy bag » à leurs clients. Loi sur le gaspillage oblige. Avec 14% de déchets alimentaires produits chaque année uniquement par les restaurants, la mesure n’est pas totalement incongrue.

Doggy bag ? Il va peut-être être temps de commencer à réfléchir à une adaptation française de la chose. Pour favoriser ce réflexe, la Ville de Paris a pris les devants en proposant à une centaine de restaurants une « box antigaspi » (on peut sûrement faire mieux…) accompagnée d’un autocollant signalant l’opération. Tous les plats de la carte ne seront sans doute pas « rapportables » à la maison, mais l’intention est là. Pourquoi d’ailleurs ne pas prévoir de mentionner sur les cartes les plats « doggy bags compatibles » ?

Comme toute nouveauté, celle-ci ne va pas manquer d’impacter nos imaginaires et nos habitudes. Elle est tout d’abord la matérialisation simple et concrète des excès de notre belle société de consommation. Comme la présence de containers en ville ou d’indicateurs de pics de pollution, il faut toujours un instrument de mesure pour favoriser les prises de conscience. Elle offre aussi aux restaurateurs l’opportunité de prolonger l’expérience vécue par leurs clients dans leurs établissements. Une manière de se souvenir d’un plat et d’un moment. Une première pierre dans le jardin marketing, encore en friche, de « l’après consommation » et qui ne devrait pas manquer de devenir très vite stratégique.

Pourquoi ne pas alors glisser dans le « doggy bag » une recette, un petit mot, une suggestion pour réchauffer un « reste » ou l’accompagner ? Peut-être deviendra-t-il même, un jour, normal de sortir d’un restaurant avec un doggy bag et donc d’envisager un repas au restaurant comme le commencement d’un autre repas… Voilà en tous cas qui devrait inciter les restaurateurs à se montrer généreux dans les portions proposées. Que risque en effet de penser celui qui quitte un restaurant sans son doggy bag ?

Nouveau rituel, nouvelle relation, nouvelles attentes, nouvelles offres, les doggy bags n’ont pas encore révélé tout ce qu’ils avaient dans leur sac…

Vélos de courses

Il suffit de compter le nombre d’affiches pour s’en convaincre. S’il est un secteur qui semble être en plein développement, c’est bien celui de la livraison de repas à domicile. Deliveroo, Take Eat Easy, Foodora pour ne citer que les plus importants acteurs (auxquels viennent s’ajouter les pionniers comme Allo Resto ou Chronoresto) se livrent une bataille à coup de com’, de levées de fonds et de livreurs. Sans oublier Uber Eats, lancé en octobre dernier et consistant à livrer en moins de dix minutes un plat via son application. Victimes en perspective…Notons au passage qu’un nouvel imaginaire est en voie d’émergence : celui du « travailleur-sportif », incarné par le coursier en vélo de course. Une nouvelle figure de la branchitude urbaine « brooklyn-oriented » ?

A en croire les opérateurs du marché, ces coursiers se recruteraient principalement parmi les sportifs, les étudiants, les intermittents du spectacle… et, bien sûr, les passionnés de vélo… Le sport n’est plus ici une pratique animée par la recherche d’un mix de performance et de plaisir, mais devient un complément de revenu possible. Comme de louer son appartement ou de « faire » occasionnellement le taxi… Un raccourci des contraintes de notre époque.

Les arguments en faveur des services de livraison de repas à domicile ne manquent pas. S’y trouvent le nombre croissant de célibataires en ville et l’allongement des temps de transport entre lieux de travail et de résidence qui contribuerait à réduire l’envie de se mettre aux fourneaux et à augmenter celle de rester chez soi pour « cocooner ». Certes. Certains esprits chagrins ne manqueront pas de faire remarquer qu’il y a quelques mois, les mêmes experts nous expliquaient avec autant de convictions que les urbains d’aujourd’hui adoraient cuisiner (pour preuve, la multiplication des émissions de « télé-culinéarité »…) et sortir avec leurs potes (la « génération terrasse »)… Pour s’extraire de ces apparentes contradictions, il suffit de considérer que rien ne s’oppose plus à rien et que le consommateur d’aujourd’hui est définitivement paradoxal. 

L’apparition des Deliveroo, Take Eat easy et autres vient aussi nous rappeler que la valeur se crée désormais dans l’intermédiation. Entre particuliers, entre professionnels et particuliers, entre professionnels. Surtout ne rien oublier car le marketing a horreur du vide. 

Nostalging

Aux Pays-Bas, Porsche vient d’ouvrir son premier Classic Center qui propose sous un même toit la vente et l’entretien de véhicules de collection de sa marque. Plus de 50.000 pièces d’origine et de la documentation d’époque sont mis à disposition des acheteurs. Le vintage s’affirme chaque jour un peu plus comme un nouveau marché.

D’après une enquête menée par le cabinet spécialisé Xerfi, les Français bouderaient de plus en plus le marché du neuf au profit des biens de consommation d’occasion. Le chiffre d’affaires des magasins spécialisés dans la vente de produits de seconde main aurait ainsi augmenté de 3,8 % entre 2013 et 2015. Rien d’étonnant. 

Le marché du vintage attire tous ceux qui veulent continuer à se faire plaisir dans un environnement économique contraint. Tous ceux qui  fuient le brillant du neuf et ne veulent pas être associés à la catégorie du bling-bling. Mais aussi tous les esthètes de la consommation, pour qui chaque acte doit être porteur de sens, d’une histoire, d’une vérité. Ou encore les snobs de tous les temps qui, hier, prisaient le rare venu de très loin et qui, aujourd’hui s’enflamment pour l’ancien issu d’ici. Cela fait beaucoup de monde.

Ce goût du vintage vient nous raconter une société où s’installe chaque jour un peu plus fortement l’idée que tout était mieux hier. Des produits qui duraient plus longtemps, des matériaux et une production de meilleure qualité, des entreprises locales avec des salariés locaux qui maîtrisaient leur métier… Accessoires de mode, montres, bijoux, voitures (retour de la Citroën Méhari et du VW Combi annoncé) et même technologie (avec, par exemple, l’engouement pour les jeux d’arcade ou le Nokia 3210), tous les marchés sont concernés. En décembre, le magazine Elle n’est-il pas paru accompagné d’un véritable catalogue d’objets de luxe émanant de CollectiorSquare, un site de vente de produits vintage ?

C’est un peu comme si les marchés « conventionnels » (entendez : du neuf) avait commencé à se dédoubler. Un pied dans le présent, un pied dans le passé comme nouvelle dynamique marketing. Qu’attendent les marques alimentaires pour ressusciter leurs packagings et leurs recettes d’hier ?

Shopping immersif

Tommy Hilfiger propose depuis peu une expérience d’achat inédite à ses clients, en leur permettant d’assister au défilé d’automne de sa dernière collection en 3D et sous 360 degrés. Cette expérience est rendue possible grâce à un appareil Samsung VR qui restitue une vision du défilé depuis le premier rang et propose un accès aux coulisses. Aujourd’hui disponible au sein de son magasin de la 5e Avenue à New York, cette expérience sera prochainement implantée à Londres, Paris, Milan, Florence et Moscou.

Grâce à la réalité virtuelle, voilà donc les défilés accessibles depuis les magasins… L’opportunité pour les consommateurs de voir les vêtements bouger et admirer les collections dans leur environnement d’origine. Face à la nécessité pour les enseignes de toujours surprendre leurs acheteurs et de se différencier de leurs concurrents pour assurer le buzz, les nouvelles technologies peuvent jouer un rôle non négligeable. Pour séduire les plus technophiles autant que pour donner à leur offre une dimension plus émotionnelle.

Les marques d’équipements sportifs ont été les premières à se rapprocher du monde virtuel. Super-héros, enjeux fantasmagoriques et décors surréalistes font désormais partie de leur monde. C’est une voie possible pour donner à leurs clients le sentiment d’être transportés « ailleurs ». Pour d’autres marques, comme Tommy Hilfiger, cela peut être l’opportunité de proposer une immersion dans leurs coulisses, leurs secrets, leurs ateliers de fabrication. Une manière de se dévoiler et de faire preuve de transparence à rapprocher des opérations portes ouvertes, web-cam et autres forums de discussion désormais intégrés dans toute stratégie de communication. Il n’est pas toujours nécessaire d’avoir à prouver quelque chose pour mettre en scène sa transparence… 

Qu’attendent les marques alimentaires pour nous emmener voir leurs animaux paître, leurs fruits et légumes pousser ou nous montrer leurs chaînes de production ?

La faim du bobo

Le dernier guide du Fooding vient de sortir. Quinze ans déjà. Comme le temps passe. L’occasion de découvrir les bonnes et modernes adresses de France et de Navarre. L’occasion, aussi, d’assister à la naissance de nouveaux concepts. Car désormais, pas de cuisine sans concept. Après la « Bistronomie » et les « caves à manger », place, cette année, à la « cuisine faubourgeoise ».

Le concept n’est pas évident à saisir spontanément. Une cuisine des faubourgs ? Mais qu’est-ce donc qu’un faubourg aujourd’hui ? Une banlieue proche ? Non, plutôt un mot « populo-rétro » choisi pour nous remettre en mémoire les faubourgs de Paris (Montmartre, Poissonnière, Saint Denis, Saint Martin, Saint Antoine) qui virent éclore des établissements porte-parole d’une cuisine bistrotière. A en croire l’animateur en chef du réseau Fooding, la cuisine faubourgeoise signerait la fin des restaurants bobos et de leur cohorte de clichés.

L’idée serait de mettre à l’honneur les restaurants qui osent, que cela se traduise par une façon de préparer un plat, de monter un établissement ou de choisir un quartier. Le faubourgeois est un bobo, certes, mais qui « tombe le dress code » et « divorce du cynisme pour épouser son époque » nous affirme l’édito du guide qui en appelle à une cuisine « régalante, inclassable et rupturiste ». Jamais on aurait pu imaginer, poursuit-il, à quelle vitesse le mouvement bobo se figerait dans un « format » aussi reproductible et sans surprises. Conséquence ? Il y a urgence à en sortir.

« On se déclasse, on déclasse. On cherche d’autres voies. On n’abdique pas. On quitte son bourg pour les faubourgs. On bénit la diversité, l’autre, son contraire. On désystématise, contre-propose, fait bouger les règles du jeu ». Dans le mouvement Fooding, les mots contribuent à l’ivresse aussi sûrement que les meilleurs vins… Il n’y a donc pas de codes « faubourgeois ». Ouf ! Cette fois-ci, on sera peut-être à l’abri des stéréotypes. Qui pourrait d’ailleurs trouver à redire à ce désir de retour à plus de vérité, d’ouverture et de générosité ? Ceux qui lisent l’état de la France à partir de celui de son assiette ont de quoi se réjouir. La nouvelle année s’annonce sous les meilleurs auspices.

Time is not only money

Expo Warhol ou Picasso, nouveau food truck, sortie du dernier Iphone ou du dernier Star Wars… les occasions de faire la queue ne manquent pas et, à en croire certaines études, 30% des clients auraient déjà renoncé à un achat à cause de l’attente. Le sujet intéresse de plus en plus scientifiques, marques et institutions. Conséquence ? Chacun y va de sa petite idée pour faire oublier le temps

Pour transformer la file d’attente en moment de plaisir, la Ville de Grenoble, avec la société Short Edition, propose ainsi à ses citoyens des distributeurs de petites histoires dans des lieux publics, calibrées en version 1, 3 ou 5 minutes. Sont imprimés des poèmes, nouvelles et autres BD issus de plus de 5 000 auteurs. Aux Etats-Unis, Starbucks a développé son « No Time No Line », un service de commande via smartphone imaginé pour désencombrer ses magasins. En France, l’année dernière, Burger King proposait un jeu mobile téléchargeable qui permettait aux plus habiles de ses clients de ne plus faire la queue : s’ils atteignaient un certain score, ils recevaient un «fast pass» valable 15 minutes leur permettant de passer devant les autres… Plus simple, il existe aussi, désormais, des applications qui répertorient les heures creuses des grandes bibliothèques ou des musées…

Les marques se sont longtemps installées dans le confort et le positif : comment rendre « les gens » plus heureux, plus malins, plus modernes… Puis, elles se sont prises à vouloir agir pour l’ailleurs ou pour l’autre, à travers diverses opérations caritatives ou environnementales. Il leur restait un champ entier à explorer : venir en aide à leurs propres clients lorsqu’ils se trouvent chez elles. Facilité d’accès au magasin, reconnaissance, réduction des temps d’attente aux caisses, mais aussi information et repérage, les champs d’action ne manquent pas.

Il ne s’agit plus, ici, de chercher à simplifier leur vie (argument trop entendu), mais à la fluidifier. Les nouvelles technologies sont leurs alliées dans ce combat. Toujours envisagées par les marques comme de potentiels moyens de paiement ou de nouvelles sources de connaissance des habitudes de leur clientèle, elles peuvent aussi leur permettre de renforcer leur lien de complicité avec leurs consommateurs.