Le commerce est le reflet de son temps. Observer l’évolution des grands magasins suffit ainsi pour nous renseigner sur notre époque. Prenons le cas du sous-sol des Galeries Lafayette Haussmann. 3000 mètres carrés. Il y a vingt ans (au début du siècle), on y trouvait toute la mode qui faisait rêver ceux que l’on n’appelait pas encore des Millenials ou des Gen Z, mais tout simplement des ados. Une sorte de Citadium avant l’heure, avant que ce dernier ne soit désigné comme l’empire du cool. Le sous-sol fut alors métamorphosé en temple de la chaussure. Après les ados, leurs mères. Un lieu vite trop petit, vu l’hypertrophie de l’offre, au point qu’il fut déménagé dans les étages l’an dernier, histoire de gagner encore 1000 mètres carrés. Là où, au même moment, débarquèrent la seconde main et le recyclage, manière pour les Galeries d’apporter leur réponse à l’air du temps.
Voilà désormais son sous-sol dédié au bien-être et à la beauté holistique. Un marché à fort potentiel qui a doublé de taille en quatre ans à l’échelle mondiale à en croire les experts… Bienvenue à la Wellness Galerie. Ici, ce sont des produits en exclusivité, bien sûr, mais aussi des vêtements de sport et de nombreuses propositions de soin (massages, consultations de médecine alternative, cours de fitness…), sans oublier la restauration dotée d’une promesse de cuisine équilibrée. Le pack complet.
Résumons : sportswear et streetwear pour commencer, puis sacs et chaussures et, maintenant, bien-être sans oublier de passer par la case recyclage. Le parfait reflet de la mutation de nos attentes et de l’ambition des grands magasins de devenir des lieux de vie. Pendant des années, leur offre et leur apparence restaient à l’identique, avec, simplement, de temps en temps, un rayon rénové et une nouvelle marque (prestigieuse) invitée. Cela ne suffit plus. Il leur faut désormais bouleverser leur organisation, chahuter les habitudes, inventer de nouvelles propositions pour répondre aux attentes d’expériences jamais satisfaites de nos contemporains. De l’inédit, de l’exclusif, du prêt-à-buzzer.
Difficile de continuer à voir les grands magasins comme une réunion d’espaces de vente. Le Bon Marché n’accueille-t-il pas en ce moment, dès la nuit tombée, une pièce de théâtre dans ses allées ?