Observer le secteur du tourisme est une bonne façon de se renseigner sur les attentes de nos concitoyens. Il dessine en creux leurs aspirations et donc leurs insatisfactions. Première grosse tendance : le tourisme écolo. Voyager sans polluer, rester plus longtemps pour ne pas multiplier les déplacements en avion et même, si possible, donner un coup de main aux locaux. Le plaisir sans la faute. Un rêve de consommateur du monde d’après.
Deuxième tendance : le voyage existentiel. Le voyage comme une quête intérieure. Aussi appelé « tourisme wellness », appellation généreuse abritant spiritualité, détox, bien-être et, désormais, prolongement de son espérance de vie. Pour gagner des années, direction la Grèce. Un avant-goût de paradis, plus huile d’olive et feta que noix de coco et chocolat. A en croire le plus connu des hebdos féminins, tout se passerait à Ikaria, île classée « zone bleue », label permettant d’identifier les lieux sur terre où les habitants atteignent les 90 ans sans s’en rendre compte. N’y cherchez pas une ville française ou du nord de l’Europe, il n’y en a pas. Tout se passe au sud. Ou au Japon et en Californie. On s’en doutait un peu… A Ikaria, donc, en échange d’un peu (beaucoup) d’argent, on apprend à manger et à dormir autrement et aussi à se déconnecter, à ralentir et à faire usage de tisanes et d’onguents aux vertus fantasmatiques. Toujours utile.
Ceux qui ne sont pas tentés par l’éternité peuvent toujours se rabattre sur un stage de jeûne. Une autre forme de voyage. L’offre ne manque pas, y compris en France. Cette fois-ci, il s’agit de payer pour ne boire que du bouillon et marcher toute la journée. Le prix de la légèreté. Entre désir de moins polluer et sentiment d’être trop bien nourri, la culpabilité n’est décidemment jamais très éloignée de ce nouveau type de tourisme. Son émergence vient nous confirmer que l’esprit Club Med, marqué par le pur plaisir, l’abondance et l’hédonisme, appartient bien au monde d’avant et n’est sans doute pas près de revenir. Mais à bien y regarder, prendre soin de la nature ou de soi sont-elles des préoccupations si différentes ? Nos ressources à nous aussi ne sont pas illimitées et nous devons veiller à les préserver. Place à l’écologie individuelle, un nouveau marché plein d’avenir.