Depuis que les enseignes ne sont plus autorisées à nous donner des sacs en plastique mais peuvent seulement nous vendre des cabas réutilisables, ces derniers se sont, sans difficulté, infiltrés dans notre quotidien au point de nous interroger sur nos habitudes « d’avant ». L’objet crée sa fonction. Une simple observation des trottoirs suffit pour constater combien les Français ont pris goût à déambuler avec ces sacs achetés quelques centimes. Pour faire leurs courses, transporter des bouteilles vides et des effets personnels, certes, mais aussi pour accueillir le « on ne sait jamais » qui semble désormais traverser les esprits, un peu comme au temps des restrictions qui voyait des marchandises apparaitre sur les rayons sans prévenir (cf. la moutarde qui, actuellement, fait sa réapparition…). La vie en mode sérendipité. Ici, la promo qu’il ne faut pas laisser passer ; là, ces objets abandonnés sur le trottoir, près d’une poubelle, ou au bord d’une route, que l’on récupérerait volontiers. Les sacs cabas sont devenus la déclinaison popu des tote-bags fashion : des attributs des consommateurs du XXI ème siècle.
Ikea était là le premier. Bleu et jaune, son sac n’est jamais loin d’un déménagement de Gen Z (qui l’apprécie aussi dans sa version rainbow flag porteuse d’un fumet de wokisme) ou près d’une laverie automatique. Il fait partie de la famille, suspendu dans l’entrée ou plié à côté de la valise à roulettes et du sac de voyage. Vient ensuite le sac Action qui a vite remplacé celui de Lidl, preuve de la percée de l’enseigne. Et aussi celui de Leroy Merlin, vert et blanc, réminiscence d’un week-end dédié au bricolage. Il y a, aussi, les sacs cabas décoratifs où le nom de l’enseigne n’est que discrètement présent mais, curieusement, ce ne sont pas les plus nombreux comme si leurs propriétaires voyaient ce contenant comme un signe explicite d’un mode de vie marqué par la consommation.
Cet été, la presse relevait l’engouement pour le sac à dos Basic-Fit, offert par la salle de sport low-cost pour toute inscription. Gris, orange, bardé de nombreuses poches, pas très esthétique (de l’avis général) mais porté fièrement. Des comptes Instagram lui sont même dédiés… Son succès, qui n’est pas sans rappeler celui des baskets Lidl, vient nous confirmer que la fréquentation d’une enseigne populaire peut engendrer autant de fierté que celle d’une marque de mode ou de luxe.